Quel impact du Brexit sur nos champs ?
Carte blanche, Bernard Keppenne, Chief Economist CBC Banque
Pour la Belgique, cet accord est primordial, comme pour tous les autres pays de l’UE, mais sans doute encore un peu plus pour nous car la Grande-Bretagne représente notre quatrième marché à l’exportation. Et le secteur agroalimentaire est particulièrement concerné qu’il s’agisse des boissons, légumes, ou produits transformés,…
L’industrie alimentaire représente en effet 9.6% du total des exportations belges destinées au Royaume-Uni et sont concernés en particulier les sous-secteurs « transformation et conservation de fruits et de légumes » et « préparation d’autres produits alimentaires ». Ces deux postes, à eux seuls, représentent 53.2% de la valeur totale des exportations de produits alimentaires vers le Royaume-Uni. Concrètement, les produits concernés sont les pommes de terre et le sucre, deux spéculations qui concernent en premier lieu nos agriculteurs wallons.
En cas de Brexit dur, l’industrie alimentaire serait donc particulièrement touchée. Et c’est pour cette raison que le SPF Economie n’a pas hésité à écrire dans son rapport sur la conjoncture économique dans les industries alimentaires et la fabrication de boissons, datant de mars 2018, que « des mesures publiques d’accompagnement seront nécessaires afin de préserver la compétitivité et par ailleurs, les exportations belges devront peut-être être réorientées si leur commerce avec le Royaume-Uni est entravé par l’apparition de barrières tarifaires et non tarifaires ».
En l’absence de certitudes, nous devons pour le moment faire un état des lieux des scénarii possibles. Le pire évidemment serait l’absence d’un deal, ce qui signifie que les échanges entre la Belgique et le Royaume-Uni seraient régis par les règles de l’OMC avec des tarifs douaniers qui pourraient s’élever jusqu’à 60% sur certains produits alimentaires. Pour éviter ce scénario du pire, certains évoquent une plus longue période de transition, qui irait jusqu’en janvier 2021 pour arriver à un accord et éviter le no-deal.
Si par contre un accord émerge, celui-ci pourrait prendre différentes formes, soit comparable à l’accord négocié dernièrement avec le Canada, soit un accord identique à celui qui lie la Suisse à l’UE, par exemple. Par cet accord, nous éviterions les tarifs prohibitifs qui seraient appliqués en cas d’absence d’accord, mais rien ne permet de dire que certaines exportations ne verraient pas les tarifs douaniers augmenter.
Mais quel que soit l’accord, inéluctablement cela entrainera aussi des formalités sur les exportations de produits alimentaires comme l’étiquetage, sur l’origine et sur les exigences sanitaires. Cela impliquera inéluctablement un surcoût pour ces produits et aura donc un impact pour nos agriculteurs.
Il faut donc espérer à tout le moins que l’accord soit entériné par toutes les parties. Mais même avec un accord, l’impact pour l’industrie agroalimentaire, tout comme pour les autres secteurs, sera important. Et les prix offerts à nos producteurs risquent d’en pâtir et la concurrence entre agriculteurs européens d’être plus féroce.