Et si l’on repensait la taxe carbone à la mode suédoise ?

Carte Blanche Bernard Keppenne, Chief Economist CBC Banque

Alors que l’accord de Paris visant à réduire à l’horizon 2030, l’empreinte carbone de 190 pays (soit le monde entier) d’au moins 20%, peine à trouver de l’élan, cela fait 30 ans qu’au nord de l’Europe, la « petite » Suède expérimente avec succès une solution pour réduire drastiquement ses émissions de CO2. Et si la marche à suivre était en fait sous nos yeux ? Evidemment un pays n’est pas l’autre, en termes d’émissions bien sûr mais aussi en termes de dépendance aux énergies fossiles et donc de capacités d’effort à fournir. Mais repenser le modèle tel que théorisé à Paris, changer de paradigme pour une mode plus suédoise de la taxe carbone, est sans doute l’une des pistes à explorer pour enfin passer la marche avant. 

Dès qu’un plan de réduction d’émissions carbone est mis sur la table, certains pays invoquent leur mécontentement de devoir assumer un coût disproportionné par rapport à d’autres. Parmi ces nations qui se sentent flouées, on retrouve bien évidemment celles qui sont en voie de développement, mais aussi par exemple la Pologne qui s’est insurgée face au plan de la nouvelle Commission européenne, étant donnée sa forte dépendance au charbon. Comment alors faire bouger les lignes et trouver une solution qui permettra aux 190 parties signataires de l’accord de Paris de répondre à leurs engagements de réduire les émissions de 20 % à 40 % d’ici 2030 ? Que ces pays aient finalement raison ou tort de s’insurger, reste qu’une clé de réussite d’un projet d’une telle ambition se situe plutôt ici loin de la globalité et des généralités mais bien dans le cas par cas et dans une amorce progressive. 

Une taxe carbone, oui mais…

Souvent évoquée, la taxe carbone est l’une des voies possibles pour « obliger » les Etats à respecter leurs engagements. En effet, cette taxe va majorer les prix des combustibles fossiles et donc favoriser les énergies alternatives et/ou une consommation moins polluante. Mais pour ce faire, encore faut-il qu’elle soit réellement dissuasive.

Selon une étude publiée par Ian Parry, expert principal en politique budgétaire et environnementale au sein du département des finances publiques du FMI, publiée dans la revue Finances & Développement du FMI (décembre 2019), l’instauration d’une taxe de 35 dollars la tonne de CO2 en 2030, par exemple, entraînerait des hausses respectives de 100 %, 25 % et 10 % des prix du charbon, de l’électricité et de l’essence.

Cependant, par rapport à leurs engagements, une taxe sur le carbone de 35 dollars la tonne n’aurait absolument pas le même résultat pour tous, comme le met en évidence cette étude. Certains pays dépasseraient leurs engagements comme l’Afrique du Sud, la Chine ou l’Inde ou en seraient proche comme les États-Unis, l’Indonésie, l’Iran, le Pakistan et le Royaume-Uni. Par contre pour d’autres pays, même une taxe de 70 dollars la tonne ne suffirait pas à atteindre l’objectif, dont par exemple l’Australie et le Canada.

Une situation n’est donc pas l’autre. Et toujours à titre d’exemple plus proche de chez nous, une taxe carbone de 35$/tCO2 permettrait à l’Allemagne de respecter les objectifs fixés par l’Accord de Paris, tandis qu’un relèvement de cette dernière de 75$/tCO2 ne suffirait pas pour la France ni pour l’Italie, d’après le FMI.

Cette différence s’explique par le fait que chaque pays a un engagement différent et surtout principalement par les différences en termes d’intensité carbone de chaque économie. Plus cette dernière est élevée et plus le pays est sensible à l’augmentation du prix du CO2. Mais bien évidemment les coûts en seront aussi d’autant plus élevés avec donc un impact négatif sur la croissance.

La Suède en modèle

Il faut donc revoir le modèle et repenser cette taxe carbone peut-être en s’inspirant de la Suède qui tend à prouver sur les 30 dernières années qu’elle a eu raison. La Suède, qui a mis en place en 1991 une taxe carbone, a divisé par deux ses émissions de gaz à effet de serre et a ainsi déjà réalisé 15% d’efforts quand dans le même temps, la grande majorité des pays est restée au point mort. Pour ce faire, la Suède a taxé tout le monde de la même façon et fait évoluer de façon graduelle cette taxe qui est passée de 20 euros la tonne à 120 euros la tonne. En contrepartie, elle a baissé les impôts sur le revenu et sur le capital puisque bien évidemment, comme n’importe quelle taxe, la « carbone » augmente les recettes de l’Etat.

Au-delà de la Suède, cette taxe carbone repensée à la mode suédoise permettrait aussi de financer des infrastructures non polluantes, ce qui aurait alors un effet d’entrainement positif. Et son avantage est qu’elle peut être introduite par étapes avec une hausse graduelle de son taux, tout en mettant en place des mesures de soutien pour les ménages et les entreprises les plus vulnérables. Mais il est impératif que les recettes de cette taxe soient utilisées de façon transparente, qu’elles ne servent pas à combler les déficits et visent à soutenir la transition énergétique.

Tous, mais pas à la même enseigne

Cette taxe carbone repensée ne pourra fonctionner que si tous les pays signataires de l’accord Paris qui la mettent en place, pratiquent tous la hausse qui leur convient réellement et de manière graduelle, en s’entendant sur les exemptions possibles. Une hausse adaptée à chaque situation est donc nécessaire tant on ne peut évidemment pas exiger que les pays à faibles revenus ou ceux qui ont peu contribué au réchauffement climatique subissent la même taxe.

De la théorie à la pratique, le chemin est donc encore long et les embuches encore nombreuses  surtout si l’on tient compte du fait que les Etats-Unis se sont retirés de l’accord de Paris. Mais il faut absolument réfléchir à la mise en place d’un modèle de taxation qui provoque un véritable changement de paradigme. Et s’il est évident que cela aura un coût, prolonger l’inertie actuelle aura aussi un coût bien plus important.

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